Marine Le Pen veut clore dès maintenant le quinquennat d’Emmanuel Macron

le penMais pourquoi donc Marine Le Pen se déclare-t-elle candidate à la présidentielle si tôt? Personne ne doutait de ses intentions. Personne ne conteste son leadership. Pourtant, cette lapalissade ne se contente pas d’énoncer une évidence, elle traduit une offensive politique très agressive vis-à-vis d’Emmanuel Macron. 

En lançant dès maintenant la campagne des présidentielles, l’ancienne candidate modifie la grille de lecture du quinquennat. Peu audible à l’Assemblée – où elle ne dispose pas de suffisamment de députés pour diriger un groupe – elle n’est pas en mesure de contester pied à pied le contenu de la politique menée par l’exécutif. En se posant déjà comme candidate à la présidentielle, elle rejette tout en bloc, c’est plus facile, et – ce qui est encore plus intéressant de son point de vue – elle conduit à analyser toute réforme, toute action politique de la majorité à l’aune de la future présidentielle. 

Car Marine Le Pen n’est pas candidate dans l’absolu, elle est candidate face à Emmanuel Macron. De ce fait, dans l’esprit de la présidente du RN, le chef de l’État n’est plus un président en exercice, mais un candidat en campagne. Comme si son quinquennat était déjà terminé. 

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Il n’est pas né celui qui fera reculer Ségolène Royal. L’ancienne candidate à la présidentielle se défend bec et ongles. Au-delà du cas de l’Ambassadrice des Pôles, cette affaire soulève une interrogation politique plus large. 

Dans la lettre publiée par Ségolène Royal, le gouvernement lui reproche ses prises de position publiques critiques sur l’exécutif. Bizarrement, il ne lui est pas demandé d’explications concernant l’utilisation des moyens mis à sa disposition par le ministère des Affaires Étrangères et celui de la Transition Écologique.  Pourtant, après les révélations de Radio France, le Parquet National Financier avait jugé bon, lui, d’ouvrir une enquête préliminaire. Une curiosité judiciaire qui a conduit plusieurs ministres, et non des moindres, à quitter le gouvernement. Alors que, depuis l’élection d’Emmanuel Macron, les ministres démissionnaires pour cause de contestation de la ligne majoritaire sont inexistants. La méthode gouvernementale vis-à-vis de Ségolène Royal alimente une certaine perplexité.

 

municLes élections approchent et l’analyse en paraît toujours aussi complexe. Ce sont des élections locales martèle Emmanuel Macron, comme avant lui ses prédécesseurs menacés par un vote sanction. Ses opposants se frottent les mains, et pourtant, comment le vote sanction sera quasiment impossible à comptabiliser en mars prochain. En premier lieu, parce que La République En Marche ne compte aucun sortant élu à l’origine sous cette étiquette. 

La deuxième raison qui rend très incertaine une analyse nationale de ce scrutin local, c’est que le non-cumul des mandats est passé par là. Un député ou un sénateur-maire ne pouvait pas s’extraire de la politique nationale sur laquelle il devait se prononcer en tant que parlementaire. Cela ne les empêchait pas d’oublier de porter haut leur appartenance à un parti. L’étiquette pouvait être discrète. Aujourd’hui, elle l’est d’autant plus qu’elle n’est qu’une étiquette, pas un discours porté dans des instances publiques nationales.  

Il faudra donc se résoudre à cette imperfection annoncée, la lecture des élections municipales sera plus compliquée qu’une simple addition de scores, ou que la mise en avant d’une ville symbolique. 

 

RECONSTUIRE, PAR LA MÉTHODE OU PAR L’HOMME

Capture d’écran 2019-05-27 à 11.25.17À gauche, les gravats de plusieurs bâtiments sont éparpillés. À droite, l’immeuble s’est écroulé sur lui-même. Mais la conclusion est identique, il faut rebâtir la maison. Il y a deux façons de reconstruire, à plusieurs, avec une méthode commune, ou derrière un homme qui dirige les travaux. La culture de la gauche devrait la pousser vers une reconstruction partagée, celle de la droite a souvent favorisé l’émergence d’un leader charismatique. Sauf que cette reconstruction doit s’opérer à l’ombre d’un duo de leaders non moins charismatiques, aiguillonnés par le collectif illisible des Gilets Jaunes.

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Gilets jaunes : le risque opportuniste

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Photo de Jutta Albers sur Pexels.com

Le mouvement spontané atteint ses limites. Parti de partout en France, arrivé aux Champs-Élysées, le mouvement des gilets jaunes se heurte aux opportunismes les plus divers.

En plus de ceux qui n’arrivent plus du tout à joindre les deux bouts, le mouvement « originel » exprimait le ras-le-bol d’une France qui a construit toute seule un fragile équilibre de vie, en périphérie des grandes villes et en périphérie de la politique. Un équilibre rompu par une politique fiscale ressentie comme injustement répartie à son détriment. Le gilet jaune de l’automobiliste symbolise cette volonté d’être vu, identifié et considéré par le pouvoir national. Cette France-là rejoint celle qui avait voté non au Traité européen en 2005 et qui avait eu le sentiment que son vote n’avait pas été respecté. En 2018, le mouvement se méfie toujours des institutions. Il rejette tous les intermédiaires, qu’ils soient politiques ou syndicaux.

Depuis le week-end dernier, plusieurs actions, violentes, racistes, homophobes ont jeté une ombre sur le positionnement des gilets jaunes sans qu’il soit pour autant assimilé à ces actes inacceptables.

L’appel à venir sur les Champs-Élysées aura-t-il raison du mouvement ?

L’hypothèse existe. Il apparaît évident qu’une minorité s’est organisée pour en découdre avec les forces de l’ordre. Cette minorité, désignée comme l’ultra-droite par le ministre de l’Intérieur, sait très bien que les images d’affrontements violents, de véhicules incendiés sur les Champs-Élysées fragiliseront le pouvoir honni. L’origine de leur mobilisation n’est pas née avec la taxe gazole. Leur but originel est la contestation du pouvoir dans son essence démocratique.

Ces opportunistes ont ouvert la voie à d’autres opportunistes livrant bataille à visage découvert, Marine Le Pen et Jean-Luc Mélenchon.  L’un comme l’autre prétend incarner le peuple. Alors qu’ils avaient dû se tenir à l’écart du mouvement la semaine dernière, les actions spectaculaires des Champs-Élysées leur ont permis de rattraper le mouvement et de reprendre à leur compte le discours anti-Macron des manifestants. La présidente du RN profitent des violences pour renforcer son profil de leader ferme sur les questions de sécurité. Les élus La France Insoumise peaufinent leur posture en collant au plus près de la colère populaire en défilant aux milieu des gilets jaunes.

Bien des gilets jaunes « originels » sont restés toute la journée sur les Champs-Élysées pour tenter de montrer une autre image, pacifique, de leur mouvement. Cette tentative était vaine. Ils ont oublié, ou ignoraient le fait qu’une manifestation non déclarée, sans interlocuteur, s’expose inéluctablement à ces débordements.

En refusant de s’organiser, le mouvement des gilets jaunes a pris ce risque. Doit-il pour autant être assimilé à ces débordements ?

Emmanuel Macron peut en avoir la tentation. Il lui suffirait de pointer la récupération des extrêmes, de droite comme de gauche, pour poser une équation électorale d’une évidente simplicité : « moi, ou le chaos ».

Mais il ne ferait que creuser le fossé entre le peuple français et ses dirigeants. C’est à dire l’inverse de ce pour quoi lui-même et les députés En Marche! ont été élus.